.: ~ Un pacte immuable ~ :.

Douce effluve de la sylve environnante du village, une senteur enivrante parcourait avec légèreté ces lieux adjacents à la divine cité. Sa provenance était inconnue, mais sans nul doute que les arbres aux bois d'acajou dont le teint brun-roux était passablement soutenu étaient quelque peu fautifs de cette suave émanation. Couplé à cet amène arôme, une agitation était audible si on essayait de se concentrer uniquement sur son ouïe : il y avait là comme un fracas continu ressemblant fortement à des bruissements atténués. De telles choses n'étaient cependant visibles uniquement pour les personnes qui contemplaient avec plaisir le décor d'une végétation, et qui étaient en parfaite communion avec la nature. Vierge de toute présence humaine durant des décennies, ces bois avaient longtemps été les plus denses du monde ninja ainsi que les plus majestueux dû notamment à leur exceptionnelle taille. Récemment, cependant, elle avait perdu de sa splendeur : l'arrivée d'humains cupides qui convoitaient de si précieux bois a joué un mauvais tour à mère nature, et une bonne partie de celle-ci s'était transformée en de simples matériaux et ustensiles ménagers.. Heureusement, l'arrivée d'un homme fît arrêter ce véritable massacre et permit de conserver une partie de cette forêt mythique. Cet homme, qui devînt ensuite le créateur de la première cité, faisait parti des personnes prenant un soin particulier de la nature, respectant sa magnificence avec ardeur. Surnommé lui-même l'ange déchu, il prenait toujours soin de l'environnement, prônant haut et fort le fait que, lorsque l'humanité aurait disparu, la nature sera toujours là. Et rien que pour cela, il fallait avoir des égards pour celle-ci.


C'est donc dans cet environnement encore fragile après sa déforestation, qu'a lieu une rencontre prévue entre Uchiwa Datenshi, le chef du village et protecteur occasionnel de la nature, et.. quelque chose. Un monstre, plus précisément.. De source sûre, Datenshi savait qu'il se trouvait dans l'immense forêt qui entourait son village, et qu'il n'avait plus été aperçu depuis des décennies.. Il faut cependant nuancer le mot " rencontre " : il ne s'agissait pas d'un simple rendez-vous établi à l'avance, loin de là.. Le chef avait tout simplement décidé d'aller à la rencontre de celui-ci, en sachant parfaitement que sa quête serait chimérique et semée d'embûches. En plus de cela, il lui fallait se préparer à un éventuel duel - le but de cette bête possédée par l'intelligence humaine, en plus d'une errance perpétuelle, risquait bien de concerner aussi la chair humaine comme son nom l'indiquait : " Shokujin " , litt. le cannibale.. . C'est d'ailleurs la raison pour laquelle il avait dû pendant un long moment à se préparer, en défiant l'élite des ninjas, lui qui n'avait plus combattu depuis des lustres, c'est à dire plus précisément depuis qu'il avait occupé le statut de Kage. Cette longue sortie il l'avait prévue bien avant la création du village, en effet il connaissait de nombreuses légendes sur cette âme humaine, errant durant l'éternité dans un corps de monstre, et dévorant les personnes qu'il rencontrait par vengeance. Il aurait pût, évidemment, croire que cela n'était qu'un simple conte pour enfants, mais.. il découvrît un jour la réalité de cette légende, en lisant un antique bouquin par hasard qui fournissait des preuves inéluctables sur l'existence d'une telle créature. Depuis, cette histoire l'avait hanté car l'âme scellée en ce monstre le ressemblait en bien des points, et sa curiosité étant trop grande il n'avait jamais réussi à simplement l'oublier. Son ambition ? Rencontrer le monstre, découvrir la réalité sur son scellement et même.. réussir à devenir son disciple. Car d'autres rumeurs racontaient qu'une telle créature avait le pouvoir d'être utilisée, par le biais d'un sceau, comme une invocation. Et pouvoir bénéficier de cela, d'une arme ultime l'aidant à accomplir ses idéaux.. serait simplement démoniaque et certainement dévastateur lors de son utilisation. Mais avant de simplement pouvoir s'imaginer cela, il lui fallait trouver la bête : une tâche excessivement ardue..


Datenshi était enfin prêt à partir lorsque que l'été commença à céder sous les soufflements quotidiens de l'automne. Bourrasques et bise du nord, voilà comment risquait de se révéler le temps lors de son voyage. La météo capricieuse ne se gênerait point aussi de faire naître sur sa tête des orages, mais tout cela était relativement superficiel aux yeux de l'Uchiwa : si son plan se passait comme prévu, il trouverait le monstre en moins d'une seule journée, et devrait combattre donc d'ici très peu de temps. Malgré cela, il restait serein. Il ne pouvait mourir ou rater son objectif; ne serait-ce que par dignité, il préférait largement mettre fin à ses jours que perdre toute once de celle-ci. C'est donc dans cet état d'esprit qu'il débuta son périple.

Voici un journal qu'il aura entretenu de manière régulière, relatant donc ses aventures avec une rare exactitude.

[ décidé de changer un peu le mode de narration, pour voir ce que ça donne, quoi ! ]

Fatiguant.. Que dire de plus ? Moi qui n'avait plus effectué un aussi long voyage depuis la création de Senjuso. Si seulement je pouvais encore utiliser mon portail spacio-temporel ! Mais ici, ce serait une véritable perte de temps de toute façon, pour le chercher il faut que je quadrille le périmètre. 3 heures, 4 heures... Et dire que je pensais que le voyage serait bref ! Heureusement que je me suis préparé à cela. J'effectue en ce moment même une pause afin de relater mes quelques heures de marche, aussi ennuyeuses qu'utiles. Ce que j'ai trouvé ? Un cerf, une dizaine de renards, et même des hiboux, en pleine journée ! Mais rien d'anormal. Si je me trouvais en sa présence, il est clair que je remarquerais quelque chose. Une présence hostile et meurtrière, tout comme la mienne.. De toute façon, inutile de continuer pour aujourd'hui : le soleil est en sa phase terminale, et va laisser place au rideau qui plongera les lieux dans les ténèbres . Autant prendre des forces pour demain, où j'essayerais de trouver au moins la piste de cette créature énigmatique.



Quelle journée ! Et dire que je pensais que ce serait encore un jour sans.. Je ne suis pas déçu ! En me réveillant de bonne heure dans la matinée, j'ai pu longé la forêt d'est en ouest. Certes, je n'ai pas trouvé ce que je cherchais, mais je pense avoir une piste ! Voir même plusieurs pistes.. Car j'ai vu un spectacle étrange qui s'est répété inlassablement, vers environ deux heures de l'après-midi - lorsque la chaleur était presque insupportable, malgré la bise - pendant plus d'une demi-heure, j'ai croisé des dizaines et des dizaines de cadavres de bestioles, allant de simples lapins à jusqu'à un immense loup dont on ne pouvait distinguer de sa carcasse seulement des os brisés. J'ai malheureusement perdu a trace à un moment, mais je pense qu'en cherchant ce genre de pistes je pourrais peut-être découvrir la zone où il réside, qui d'après ce que je sais actuellement se situe plutôt vers le centre-est, en tout cas dans ces environs c'est là que j'ai perdu sa trace. Mais là, je suis exténué et suis bien trop fatiguer pour continuer à écrire. D'ici quelques jours, je suis sûr que je découvrirais qui se cache derrière cette antique légende..


Mort : chose qui à failli me prendre aujourd'hui. Je n'ai pas peur de celle-ci, mais rater si près du but serait.. si rageant ! D'autant qu'aujourd'hui, une chose est sûre : le monstre existe bel et bien. Et ce qu'on raconte sur lui n'est pas totalement faux d'ailleurs.. Mais avant d'expliquer ce qui s'est passé lors de cette " rencontre ", voici les faits : ce matin, en me levant - toujours de bonne heure - j'ai eu la malencontreuse surprise d'apercevoir que mon sac qui contenait toutes mes provisions avait disparu. Chose que je pouvais facilement résoudre en retournant immédiatement au village, mais.. j'aurais alors perdu 2 journée de recherche intensives et devrait repartir à zéro. Impossible donc..Alors je me suis décidé de rester et manger ce qui est comestible : pas grand chose, donc. Heureusement que je suis tombé sur ce renard, à midi, sans ça je serais certainement dans un piteux état. Enfin bref, le ventre un peu plus rempli, je suis reparti en quête de la créature avec l'intime conviction que je me rapprochais dangereusement de son domicile. Vers 18 heures, mes pensées devinrent réalité. J'ai perçu soudainement une présence extrêmement.. comment dire ? Dérangeante ? J'ai senti en me concentrant sur cette source une âme aussi déterminée et mauvaise que la mienne. Je dit " dérangeante ", mais en faite cette présence m'a semblée plutôt plaisante, comme si je découvrais que je possédais un frère jumeau. Gorgé de vigueur, je me suis dirigé avec une légère exaltation vers cette candide - à mon goût - émanation. Chose qui ne m'était encore jamais arrivée: car en effet, tellement hâtif que je fus, je ne pris même pas la peine d'observer plus attentivement les lieux. Grosse erreur, car quelques secondes plus tard je sentis sous mes chaussure non plus la terre qui était sensée me soutenir mais une matière boueuse, presque.. caoutchouteuse. Mes pieds commencèrent à lentement s'enfoncer dans les abysses, et en plus il m'était impossible de les mouvoir. En moins d'une minute, mon corps se retrouva à moitié recouvert d'une étrange matière visqueuse ayant la même consistance que la boue et une odeur de.. chair humaine. Un être humain normalement constitué aurait évidemment céder sous la panique, mais par chance je ne suis pas comme les autres. Non, pour moi cette senteur de chair humaine ne me terrorisait guère et la peur de mourir était aussi présente dans mon esprit que le petit déjeuner que j'avais pris l'année dernière. Malheureusement, mourir étouffé en quelques secondes par un minable petit stratagème serait très mal vu et ma dignité serait au plus bas. Et donc, avec une certaine aisance - je ne dirais prestance, même s'il faut l'avouer : ce fût plutôt bien effectué - je me téléporta à une toute petite distance de ma position grâce au plus précieux des dons héréditaires que mon clan possède; la capacité de contrôler à sa guise l'espace-temps. En observant, à quelques mètres de l'endroit où je fus presque enseveli, l'espèce de tombeau marécageux je me rendis compte qu'il se trouvait juste devant un portail de petite taille à travers lequel il me serait difficile de passer sans me tortiller un peu. Ma curiosité était grande en ce moment là, mais ma sagesse me conseilla d'observer un peu l'entourage avant de tenter quoi que ce soit, et c'est avec une certaine déception de devoir encore attendre - même si raisonnablement - la vue de la créature que je me mis à scruter avec attention l'endroit. Des heures défilèrent, avec une lenteur.. incomparable. La nuit s'était déjà emparée de la sylve lorsque je me mis à lentement fermer les yeux. Cependant, grâce à un hululement provenant de l'arbre situé sur ma gauche je pus rester éveiller.
En ce moment, il n'y a toujours rien, et il commence vraiment à se faire tard : je rédige donc pour la première fois sans être véritablement occupé et relate avec une certaine délectation ce qu'il s'est passé aujourd'hui. Et voilà que je n'ai plus rien à dire, hormis : demain, je saurais. Bonne nuit.

Oh, belle ode de la vie - ainsi que de la mort ! Si je devais, parmi toutes les journées que j'ai pour l'instant vécues, choisir une que je revivrais sans hésiter il s'agirait bien de cette journée-ci. M'est-il seulement possible de vous compter cette histoire ? Je n'en sais point.. Mais, en tout cas, du moins s'il m'en est possible vu mon excitation actuelle, je vais essayer : que vous ne sachiez pas comment s'est déroulée cette journée serait bien trop décevant à mon goût.

Je vous rappelle donc rapidement ma journée d'hier : j'ai trouvé le repaire du monstre - c'est ce que je pensais en tout cas - et me suis décidé, après m'être assez bêtement presque fait tué, de surveiller en peu sa " tanière ". N'ayant rien pût détecter d'intéressant, je me suis après quelques hésitations endormi. Et, de mon réveil jusqu'à maintenant, tout fût simplement.. mythique. Voici ce qu'il s'est passé.

Dès que le soleil fût suffisamment étincelant pour pouvoir illuminer la sylve dans laquelle je m'étais assoupi, je me réveilla, entrant enfin dans le monde réel en sachant parfaitement que la mort attendait non loin de là, s'excitant dans l'idée où elle pourrait s'emparer de mon âme. Encore une fois je fis le tour de l'endroit - pure précaution - qui ne se révéla, à la fin, inutile. Rien, hormis quelques traces de sabots sur le sol dont l'importance ne me frappait pas encore alors - de simples chevaux étaient certainement passés par là. Après un moment d'intense réflexion, je me décida à - tenter - d'atteindre l'étroit portail, à l'endroit où je m'étais bêtement fait presque tué le jour d'avant. Cette fois, je me déplaça jusqu'à quelque centimètres du portail en utilisant ma technique afin de ne pas déclencher d'autres possibles pièges. C'est alors que j'entrouvris le portail, et m'agenouilla afin de passer par l'étroite ouverture. Et découvrir, presque sans surprise, ce que je cherchais.